Si quelqu'un m'eût dit, il y a deux ans, que j'allais bientôt écrire
un livre, je n'aurais fait que rire de cette supposition.

Et voilá pourtant comment le malheur est arrivé.

Au cours de mes derniéres pérégrinations, j'écrivis quelques lettres
qu'on imprima dans un journal de ma patrie; quelques-unes d'entre
elles, å mon grand étonncmentj furent reproduites dans d'autres
journaux. J'étais donc passé auteur sans m'en être douté et sans
l'avolr voulu. A mon retour, je me trouvai même, circonstance rare,
en puissance d'éditeur bien avant que le manuscrit fût achevé. II
l'est maintenant, mais il lui faut une préface, m'assure-t-on.

J'avoue humblement que sous ce rapport j'ai étépris a l'improvisle.
J'ai beaucoup lu dansma vie : des voyages d'abord, puis des romans
et encore des romans. Tourguéneff, V. Cherbuliezet 0. Feuillet sont
mesauteurs favoris. J'ai l'habitudede commencerunlivreparlafin, et,
ádirela vérité, jene coupe jamais la préface. J'ai bien dû faire amende
honorable, et, par triste compensation, dés lors je ne lis plus guére
que des préfaces. C'est peu diverlissant, et cela ne m'a pas donné
l'ombre d'une inspiration. Pour varier, au lieu de servir å mes lecteurs
un plat accommodé avec plus ou moins de modestie, comme c'est
I'usage, leur donnant un avant-goût des joies qui les attendent, je
procéderai d'une aulre maniére : si le lecteur se sent le courage de
poursuivre,  en conscience, il sera prévenu.

D'abord et avant tout, j'écris en franqais,   quoique le francjais ne
soit   pas  ma  langue malernelle.  Cosmopolite dés mon  enfance, j'ai
 

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