Jaccard, Henri, Essai de toponymie

(Lausanne :  G. Bridel & cie,  1906.)

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532                                  YVONAND  —  YVORNE

= colline des sorbiers. Nous écartons la 4®? le sorbier étant rare
ou inconnu dans ces régions inférieures et Yverdon n'ayant pas
de colline ; la i^^, parce qu'elle ne concorde pas avec les formes
primitives ; enfin la 2^ qui ne justifie pas le e initial et qui nous
donne un mot hybride formé d'un élément germain bûr, maison,
et d'un celtique dunum ; nous adoptons la 3^, forteresse d'Eburos,
qui explique le é initial, ce qui la rend la plus plausible, et qui
s'applique à tous les composés. Ce nom propre Eburos se retrouve
en effet dans de nombreux composés: Eburodunum (Embrun),
Ebrovicum pour Eburovicum (Evreux), Evrogilum, primitivement
Eburogilum, Ebreuil, Allier ; Eburobrica, Gaule lyonnaise, Eboro-
lacum, Aquitaine, noms cités par Diefenbach.

Yvonand, D. Yverdon, Evonant, 1009, ion, Matile, 1142,
ii']^, etc., Ivonant, iioo et i4o3, M. R. I, i65 et XIV, 374^
P. de Evonant, 1215, M. R. VI, 147, B. de Vouant, xii^ s., M.
R. XII, Eyvonant, i437, Yvonant, i453, i538. D'après Gatschet,
de eve et de nant, l'eau du ruisseau ou le ruisseau d'eau : nom
bien étrange et étymologie à rejeter. Vient d'un n. pr. germain
Evo, racine ewa, du v. h. ail. ewa, temps, et de nant, ruisseau
r=r le ruisseau, le nant d'Evo. Fôrstem., 398.

Yvorne, D. Aigle, Evurnum, in pago capitis laci, 1020,
Yvorna, i332, extentes de Chillon, Yvorna, Yvornia, M. R.,
2« S., II, Yvornaz, i588, chartes d'Aigle. D'après Lutz et Studer,
endroit où les troupeaux hivernent, mais l'ancienne forme s'y op¬
pose. Vient plutôt du celtique eburos, if, sorbier, irlandais ibur,
if, breton evor, bourdaine. Comme le latin ebur, ivoire, a fait
l'adj. eburnus, d'ivoire, le subst. eburos a pu donner naissance à
un adjectif analogue (vicum) eburnum, village de l'if, des ifs
(ou des sorbiers) ; l'if est commun dans les forêts du voisinage.
Gysi, Indic. hist. suisse, i885 (et Holder d'après lui) fait d'Yvorne
l'Ebodouron de Ptolémée.

Z en Valais, — comme dans la vallée d'Aoste, — remplace ch
(prononcé ts) et j (pr. dz, z) des autres régions romandes, on trou¬
vera donc ces mots étudiés avec les formes en ch-j.
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