Tauxier, Louis, Le noir de Bondoukou

(Paris :  E. Leroux,  1921.)

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On peut donc dire que la fondation de Bondoukou est relativement ré¬
cente, qu'elle date de cinq cents ans environ, c'est-à-dire du xv® siècle ».

On voit quelle est la thèse du capitaine Benquey: il fait la distinction de
Bondoukou même et de Bégho, ville plus ancienne d'où les Dyoulas se¬
raient venus à Bondoukou vers 1400. Certes il a raison en faisant cette dis¬
tinction : il a existé jadis sur les bords ou près des bords de la Volta Noire,
à 60 kilomètres environ E.N.E. de Bondoukou, une métropole commer¬
ciale dont il reste encore des ruines (fort grandes, paraît-il), d'où les Dyou¬
las sont venus à Bondoukou et cette thèse est acceptée actuellement par
tous (1). Mais le capitaine Benquey qui a corrigé heureusement sur ce point
Binger n'a pas fait une critique assez serrée des assertions de celui-ci et
des textes du Tarikh-es-Soudan. Il a laissé échapper ainsi des erreurs
que nous avons à relever. Nous commencerons cet examen par ce que dit
le capitaine Binger lui-même des origines de Bondoukou : « Bondou¬
kou, dit-il (2), ou Bitougou est plus ancienne que Djenné : sa fonda¬
tion est antérieure à 1043. D'après Ahmed Baba (3) qui la désigne sous
le nom de Bitou, c'est en faisant le commerce du sel de Teghasa et de l'or
de Bitou que Djenné s'est enrichie. Il suffit du reste de se promener dans
Bondoultou pour acquérir la certitude qu'on est en présence d'une des plus
vieilles cités soudanaises : les cendres, détritus et ordures atteignent plu¬
sieurs mètres d'épaisseur. G'est en vain qu'on chercherait des terres servant
à la confection des briquettes pour faire les cases; aussi les habitants ex-
trayent la terre nécessaire aux cases à plusieurs centaines de mètres de
l'emplacenient actuel de la petite ville, ce qui est excessivement loin
lorsqu'on songe que le noir est de son naturel très fainéant.  D'autres in-

(1)  M. Delafosse dit au sujet de Bégho {Haut-Sénégal-Niger, tome V% p. 279, 280,
en note) « Bégho, dont on montre encore les ruines ou tout au moins l'emplace¬
ment entre Banda et Fougoula, dans la colonie a iglaise actuelle de la Gold-
Coast, était située à l'Est-Nord-Est de Bondoukou, près de la rive sud de la Volta-
Noire, en amoat de Kintimpo. Gette ville aurait été détruite à la suite d'une
guerre civile vers la fin du xiv^ siècle et les Dyoula qui l'habitaient serait allés
fonder définitivement Bondoukou (ou Gottogo) et Kong au début du xy*" siècle. A
Kong on prétend que les familles Ouatara, Dao, Barho, Kérou et Touré seraient
venues directement de Dienné tandis que les Sissé, Sarha, Kamara ou Kamaya,
Dagnoro, Kouroubari, Timité et Taraoré seraient venus plus tard de Bégho; on
donne souvent à cette dernière ville le nom de Ouorodougou (pays des colas),
parce qu'elle était située en effet au seuil de l'une des princij)ales régions pro¬
ductrices de cola, m ils il faut se garder de la confondre avee le Ouorodougou de
Mankono et de Séguéla (ouest de la Côte-d'Ivoire) », — Relevons une légère inad¬
vertance au début de ce morceau. Banda et Foughoula étant un seul et unique
village sous deux noms, — Signalons qu'il y a quelques années l'almamy de Bon¬
doukou Kounandi Timité, sous Tinfluence fj'impressions pessimistes, qui furent
heureusement passagères, quitta Bondoukou et le territoire français pour aller
s'installer parmi les ruines de la vieille métropole de Bégho. Il revint du reste
assez promj)t('ment à Bondoukou.

(2)  Du Niger au golfe de Guinée, tome II, p. 161, au début du chapitre xni.

(3)  Auteur jadis ])résumé du Tarikh-es-Soudan, En réalité cet auteur est Es-Sadi,
comme l'a n^ontré M. Houdas qui a traduit le Tarikh en 1900.
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