Tauxier, Louis, Le noir de Bondoukou

(Paris :  E. Leroux,  1921.)

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CHAPITRE   U
LES  POUVOIRS  PUBLICS
 

Ce furent les Abrons, comme nous le savons, qui établirent des pouvoirs
politiques sérieux dans le cercle de Bondoukou. Avant eux régnait l'anar¬
chie nègre : une multitude de villages indépendants les uns des autres,
ou de petites royautés minuscules comme celle des Nafanas (ou Wandaras)
à Bondoukou même. Il n'y a que dans le Nasian qu'un petit état-canton
semble avoir existé avant eux, petit état dû probablement à la présence
des éléments huélas et dyoulas. — Si les Abrons n'étaient pas survenus,
il est probable que toute la région de Bondoukou aurait passé sous la do¬
mination peu guerrière des Dyoulas et aurait formé de petits états comme
celui du Diammala (situé entre Groumania et Bouaké). Le Barabo (avec
ses Dyoulas et ses Koulangos) aurait formé une petit état indépendant du
même genre.

Bref, des autochtones cultivateurs,fanarchiques et paisibles^ exploités
par des groupes de Dyoulas commerçants qui se seraient emparés du pou¬
voir politique, tel aurait été le tableau (offert, avant Samory et les Fran¬
çais, par une grande partie du pays sénoufo) qu'aurait offert aussi la
région de Bondoilkou.

Mais les Abrons parurent, et, comme ils étaient plus guerriers que les
autochtones, avaient plus de discipline étatique et des aptitudes politiques
supérieures, ils conquirent le pays et y organisèrent des pouvoirs publics
relativement puissants.

Ils laissèrent subsister les groupements qui existaient avant eux mais ils
s'y superposèrent.

Ainsi le Nasian subsista, comme canton avec ses chefs héréditaires. Le
Barabo, qui se forma probablement par l'arrivée des Dyoulas au moment
même où les Abrons faisaient peu à peu la conquête du pays, fut aussi
respecté comme canton et conserva ses chef dyoulas ainsi que certaines
prérogatives, par exemple celle d'être un lieu d'asile inviolable pour les
captifs abrons fugitifs. De même les Nafanas restèrent en principe les chefs
de Bondoukou, enfin les petites dynasties des trois petits cantons Bonna et
du Bini furent aussi respectées, mais, au dessus de tout cela, de grandes
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