Tauxier, Louis, Le noir de Bondoukou

(Paris :  E. Leroux,  1921.)

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CHAPITRE  III
LES   HUÉLAS   ET   LES   NOUMOUS
 

Il y aurait une bien jolie étude à écrire sur ce qu'on peut appeler les
Proto-Dyoulas, c'est-à-dire sur ces races peu étudiées que sont les Huélas,
les Noumous, les Ligbis et les Veï. Ces races paraissent plus anciennes que
les Dyoulas proprement dits : elles ont exploité avant ceux-ci, semble-t-il,
la grande région du kola à l'orée de la forêt dense. Elles se sont avancées
plus loin vers le sud puisque les Véi sont allés s'établir jusqu'à Tocéan,
à cheval sur la frontière actuelle du Sierra-Léone et du Libéria. Enfin la
langue semble devoir au premier abord se rattacher au groupe mandé-tan,
puisque dix fait tan en huéla comme en noumou, en ligbi comme en veï.
Cependant le nombre cinq se rapproche du Soso (1) et M. Delafosse (2)
avoue que « les Veï comptent par cinq comme les Mandé du groupe de fou,
tandis que les autres Mandé du groupe de tan comptent par dix )). H sem¬
ble donc que les dialectes Proto-Dyoulas, quoique influencés en partie par
la langue mandé-tan, se rapprochent plutôt des dialectes mandé-fou et même
mandé-bou (3). En tout cas on pourrait les considérer comme intermé¬
diaires entre les uns et les autres. Au point de vue religieux, les Huélas
sont beaucoup moins musulmanisés que les Dyoulas, étant restés en partie
fétichistes, et, si les Ligbis et les Veï sont musulmans, les Noumous en
revanche ne le sont pas du tout. Tout nous ramène donc à une antériorité
des Proto-Dyoulas sur les Dyoulas.

Nous avons dit dans l'Historique que c'était Binger qui avait eu l'hon¬
neur de découvrir les Ligbis, Delafosse les Huélas elles Noumous.

(( Les Huéla, dit Delafosse (4), (appelés Vuéla par les Dyoula) habitent

(1)  Cinq fait souli en soso, solo ou soro en huéla et en noumou, dourou en
bambara, loulou en malinké.

(2)  Essai de manuel pratique de la langue mandé ou inandingue, chapitre vi, p. 257.
— M. André Arcin (Guinée Française, p. 212, 213) fait à ce sujet les mômes obser¬
vations que nous et rapproche la langue vei du soso et du soninké.

(3)  Le un des Huélas et des Noumous « dié » ou « dyé », celui des Veï qui est
« dondo », se rapprochent idu « do » des Mandé-Bou et non pas du kélé des Bambà¬
ras et des Malinkés.

(4)  (Vocabulaires comparatifs, etc., 1904, page 168.
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